Claude Goasguen, député Les Républicains de Paris, est mort du Covid-19 – Le Monde

Claude Goasguen, alors député Les Républicains de Paris, à l’Assemblée nationale, en décembre 2018.
Claude Goasguen, alors député Les Républicains de Paris, à l’Assemblée nationale, en décembre 2018. THOMAS SAMSON / AFP

Il était d’une génération où certains hommes se choisissaient une devise. La sienne disait « Aut pax, aut bellum » : soit la paix, soit la guerre. Pas d’entre-deux. Parfois séducteur passionné, souvent batailleur impétueux, Claude Goasguen a perdu le dernier de ses combats, celui contre le coronavirus. Il est mort jeudi 28 mai, à l’hôpital Corentin-Celton d’Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), à l’âge de 75 ans. Avec lui disparaît un libéral assumé, ministre éphémère et très longtemps député, considéré comme l’un des derniers « parrains » de la droite parisienne.

« La vie politique a besoin de clivages, affirmait Claude Goasguen. Sinon, la démocratie toussote. » Son ancrage personnel était clairement à droite. Son engagement avait même débuté à droite de la droite. Né le 12 mars 1945 à Toulon au sortir de la guerre, cet admirateur de Bonaparte, moitié breton, moitié corse, se serait bien vu officier de marine, comme son père. Mais la décolonisation casse sa vision des mers lointaines. Dans sa ville, il voit débarquer des pieds-noirs perdus, qui ont dû tout emporter dans une valise.

Farouche partisan de l’Algérie française, le jeune homme soutient le candidat d’extrême droite Jean-Louis Tixier-Vignancour lors de l’élection présidentielle de 1965. A Paris, où il est venu poursuivre sa scolarité, il préside, en 1967 et 1968, la « Corpo » des étudiants en droit, qui, en matière de violence, n’a rien à envier à Occident, le groupuscule de ses amis Alain Madelin, Gérard Longuet et Patrick Devedjian. Ancien rugbyman amateur, Claude Goasguen n’est pas le dernier à se battre. « Je me suis fourvoyé », admettra-t-il plus tard.

Ephémère ministre

Mai-68 le fait réfléchir et quitter quelques années la politique, au profit de l’enseignement du droit. Mais il y revient vite, après une rencontre avec le député Eugène Claudius-Petit, un résistant. « Il m’a tout de suite plu car il avait des convictions et il engueulait tout le monde », racontera Claude Goasguen, comme s’il s’était vu dans un miroir. Il entre ainsi dans la famille centriste, où il sera successivement membre du Centre des démocrates sociaux, de l’UDF et de Démocratie libérale, avant de rallier l’UMP, en 2002.

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Dans les années 1980, il se trouve un deuxième père politique : Jacques Chirac, alors maire de Paris. Avec son appui, Claude Goasguen est élu au Conseil de Paris en 1983, devient conseiller technique de René Monory au ministère de l’éducation nationale en 1986, avant d’être nommé recteur d’académie et directeur du Centre national d’enseignement à distance. Entre 1989 et 1995, Jacques Chirac en fait son adjoint aux affaires étrangères à la mairie. En 1993, le fougueux centriste entre aussi à l’Assemblée nationale, où il remplace Jacques Toubon, dont il était suppléant et qui est nommé ministre. En plein hiver, Claude Goasguen se fait alors connaître avec une proposition de loi anti-SDF, qui prévoit des peines de prison et d’amendes pour les squatters et leurs « complices ».

« La majorité, ici, c’est moi qui la tiens », assurait encore Claude Goasguen début 2020

En 1995, il soutient d’emblée son mentor contre Edouard Balladur lors de la violente campagne présidentielle. L’élection remportée, il est nommé ministre de la réforme de l’Etat, de la décentralisation et de la citoyenneté dans le gouvernement d’Alain Juppé. Remercié lors du premier remaniement, au bout de cinq mois, il ne lâche pas la politique nationale pour autant. En 1997, il réunit plus de 70 % des suffrages dès le premier tour des législatives dans le 16e arrondissement et retrouve l’Assemblée. Il y est réélu pendant plus de vingt ans, devenant un poids lourd de l’Ouest parisien, d’autant qu’à partir de 2008, il est aussi maire de l’arrondissement. « La majorité, ici, c’est moi qui la tiens », assure-t-il encore début 2020.

Fin de carrière chahutée

Grand défenseur des beaux quartiers, qu’il juge maltraités par les maires socialistes de Paris, Claude Goasguen consacre alors une autre part de son temps à combattre l’antisémitisme et soutenir Israël, un pays pour lequel ce Méditerranéen s’est pris de passion. Des années durant, il préside le groupe d’amitié parlementaire France-Israël. « Mon grand regret est de ne pas être juif moi-même », confie-t-il un jour. Il est aussi en première ligne dans la défense des chrétiens d’Orient.

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La fin de sa carrière se révèle chahutée. En 2016, ses propos selon lesquels la France a « un problème avec les Maghrébins » suscitent la polémique. L’année suivante, il se fait réélire député, mais d’une courte tête seulement. Touché par la loi sur le non-cumul des mandats, il garde son siège à l’Assemblée et abandonne celui de maire d’arrondissement. Pour lui succéder, il fait élire par le conseil d’arrondissement une de ses adjointes, Danièle Giazzi, en espérant continuer à exercer la réalité du pouvoir.

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Les premiers temps, M. Goasguen conserve d’ailleurs son immense bureau, sa voiture de fonction, son chauffeur, et le magazine à sa gloire, 16 mairie. Mais au fil des mois, la nouvelle maire prend goût à la lumière… et ses relations avec le volcanique député deviennent exécrables.

Si bien qu’en 2020, l’ancien maire fait tout pour que son ancienne protégée ne soit pas investie par Les Républicains. Pour la contrer, il choisit un fidèle, chiraquien comme lui, l’avocat Francis Szpiner. Le 15 mars, celui-ci arrive largement en tête du premier tour des élections municipales. Un ultime succès pour Claude Goasguen, qui figure en troisième position sur la liste, avant que le coronavirus ne s’en prenne à lui. Hospitalisé depuis le 24 mars, il avait été placé en coma artificiel, puis en était sorti. Son cœur a fini par lâcher.

Claude Goasguen en quelques dates

12 mars 1945 Naissance à Toulon

1993 Député de Paris

1995 Ministre de la réforme de l’Etat, de la décentralisation et de la citoyenneté

2008-2017 Maire du 16e arrondissement

28 mai 2020 Mort à Issy-les-Moulineaux

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