Hommes et femmes sont-ils égaux face au Covid-19 ? – Libération

Bonjour,

Des données collectées dans le pays foyer de la pandémie, mais également en France, permettent d’apporter des éléments de réponse à cette question.

Des chercheurs affiliés au CCDC (Centre chinois de contrôle des maladies) ont analysé les dossiers médicaux de 44 672 patients traités pour des cas confirmés de Covid-19. Sur l’ensemble de la Chine, les infectés seraient à 51,4 % des hommes. Autrement dit, que les hommes Chinois seraient 6 % plus susceptibles d’être testés positifs que les femmes.

Ce taux est de 4 % dans la province de Hubei, tandis qu’à Wuhan, les hommes ont été 1 % de moins que les femmes à avoir été identifiés comme porteurs du coronavirus. La disparité de ces données pourrait trahir autre chose qu’une différence de susceptibilité «innée» au coronavirus, comme par exemple une différence d’accès aux soins (et donc aux dépistages) selon le sexe.

De fait, en France, selon le dernier bulletin de Santé publique France portant sur 6 378 cas confirmés, les hommes sont environ 10 % moins touchés que les femmes.

Globalement égaux face à l’infection, mais pas face à ses conséquences

Alors que le nombre d’hommes et de femmes infectés est relativement proche, le taux de décès apparaît très différent. En Chine, il est de 2,8 % pour les hommes, contre 1,7 % pour les femmes. Durant la période étudiée par les chercheurs, 63,8 % des décès concernaient donc des hommes.

Constat voisin en France, où 58,4 % des décès recensés à date du 15 mars sont masculins. Les hommes sont également deux fois plus nombreux que les femmes à passer en réanimation.

Une piste d’explication pour la Chine : les hommes fument plus que les femmes

Ces données, les plus fournies à cette heure, ne sont toutefois pas nécessairement généralisables à d’autres pays. En effet, en Chine, on estime que 52 % à 56 % des hommes sont fumeurs, contre seulement 2 % à 3 % des femmes. Or, les complications suites aux affections respiratoires liées au Covid-19 sont nécessairement plus graves chez les fumeurs.

En outre, on constate que certaines pathologies préexistantes telles que le diabète ou l’hypertension augmentent le risque de décès suite à une infection à ce coronavirus. Là encore, la fréquence de ces deux pathologies est supérieure chez les hommes (10,6 % contre 8,8 % pour le diabète, 29,2 % contre 24,1 % pour l’hypertension).

Pour la France, les différences entre fumeurs et fumeuses existent, mais sont moins marquées (respectivement 36 % et 28 % des hommes et des femmes fument). Il en va de même pour le diabète (moins fréquente en France) et l’hypertension.

Une hypothèse immunitaire à explorer

Dans un article publié le mois dernier dans le New York Times, des chercheurs observent qu’une mortalité supérieure des hommes sur les femmes a déjà été observée avec d’autres épidémies virales affectant le système respiratoire. Ce fut le cas avec le premier Sars-CoV en 2002-2003, de même qu’avec le Mers-CoV apparu en 2012.

Au-delà des questions liées au mode de vie ou aux comorbidités, ils évoquent l’hypothèse selon laquelle les femmes disposeraient d’un système immunitaire plus robuste. Un fait qu’illustre notamment la surreprésentation des femmes parmi les personnes victimes de maladies auto-immunes (voisin de 80 %). Les chercheurs notent également que, dans le modèle animal, les souris mâles sont également plus susceptibles d’infection aux coronavirus que les femelles.

Il reste toutefois à évaluer le poids réel de ces facteurs immunitaires, chez l’humain, comparés aux facteurs comportementaux et environnementaux.

Les données recueillies dans d’autres pays largement touchés par le Sars-CoV-2 permettront d’affiner nos connaissances sur la différence réelle de dangerosité de ce coronavirus pour les hommes et les femmes.

Florian Gouthière Source

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